Divorce : Comment aider votre client à protéger son entreprise ?

L’année dernière, 46 %° des mariages français se sont terminés par un divorce. Statistiquement un nombre significatif de nos clients dirigeants d’entreprise se retrouvent un jour confrontés à cette situation délicate. En cas de manque d’anticipation d’une telle issue à la création de l’entreprise, sa pérennité en ressort systématiquement défiée. Il est de notre rôle d’accompagnateur d’informer et d’aider notre client à prévoir cette éventualité.

Les conséquences du choix du régime matrimonial

La première précaution à prendre réside dans le choix du régime matrimonial et la rédaction de dispositions matrimoniales au moment du mariage (ou postérieurement). On entend souvent que le régime matrimonial le plus adapté au chef d’entreprise est celui de la séparation de biens, mais en réalité, il est important de nuancer ce propos. Le régime matrimonial adéquat pour votre client est celui qui correspond à sa vie de couple et à ses habitudes de gestion.

Si votre client désire partager ses revenus avec son conjoint, partager ses dépenses sur un compte commun et financer les biens immobiliers du foyer sans tenir compte de la capacité de chacun, un régime communautaire lui correspondra mieux. Si au contraire il souhaite gérer individuellement ses revenus et en tenir compte pour le financement du patrimoine commun, le régime séparatiste sera plus adapté.

En choisissant un régime ne corrélant pas aux envies du couple, votre client risque de rencontrer des problèmes de gestion dus à l’incompréhension de la nature même du régime choisi. L’entreprise ne doit pas dicter le choix du régime matrimonial, qui englobe l’intégralité du patrimoine des époux. Il convient simplement d’adapter le régime via des dispositions et clauses afin de protéger l’entreprise.
Afin de pallier ces éventuelles difficultés, il convient de les anticiper en amont et de prévoir les dispositions adéquates.

Si votre client a opté pour un régime communautaire, vous pouvez à titre d’illustration lui conseiller de rédiger une clause d’exclusion des biens professionnels de l’actif de communauté. Celle-ci lui permettra, en cas de divorce, de rester intégralement propriétaire de sa société et de pouvoir continuer à l’exploiter sans se charger de comptes à rendre à sa/son futur(e) ex-époux/se. Par ailleurs, les revenus et salaires que tireront votre client intègreront l’actif de communauté, faisant ainsi de cette solution un compromis idéal pour le dirigeant souhaitant partager le fruit de son travail avec son conjoint s’occupant souvent plus de la gestion du quotidien.

Par ailleurs, vous pourrez l’accompagner dans l’ajout d’une clause d’agrément dans la rédaction des statuts de l’entreprise, au sein de laquelle le conjoint renonce a priori à la revendication de la qualité d’associé.

Les conséquences du choix de la structure juridique de la société

Dans tous les cas, une forme sociétaire sera préférable à une auto-entreprise en cas de divorce. Dans cette dernière forme, les patrimoines personnels et professionnels sont amalgamés, ce qui signifie que le conjoint peut prétendre à la moitié des actifs de l’entreprise, mais est également redevable pour moitié de ses dettes en cas d’insolvabilité, situation pouvant rendre compliqués des divorces qui ne l’étaient pourtant pas.

Les sociétés à responsabilité limitée demeurent ainsi un choix plus sécuritaire. En cas de divorce, le calcul du partage se fait uniquement sur les droits sociaux et non sur les actifs de l’entreprise, évitant donc les risques de démantèlement.

Par ailleurs, il convient de porter une attention particulière aux couples dont l’un des époux travaille dans l’entreprise en qualité de conjoint collaborateur, déclaré ou non. En premier lieu, s’assurer de la déclaration du statut est indispensable au risque d’une requalification en travail dissimulé. Il est également absolument nécessaire de conseiller au conjoint collaborateur de cotiser pour sa retraite, car il fait bien souvent le choix inverse.

Outre l’aspect purement financier du montant de la retraite, le fait de ne pas cotiser peut s’avérer fatal en cas de divorce. En effet, afin de justifier des années de travail ayant permis au bon développement de l’entreprise, le conjoint collaborateur se verra dans l’obligation de s’en remettre à des procédures légales, soit par voie de prestation compensatoire soit pour enrichissement sans cause.

Malheureusement, cette deuxième option peut qua-si-systématiquement être mise de côté, surtout pour le cas des régimes communautaires, car il est déterminé que le conjoint ne subit en réalité aucun appauvrissement personnel étant donné que les revenus du foyer sont communs.

Reste alors l’option de la prestation compensatoire souvent mal comprise : elle n’a pas pour objectif de compenser les pertes subies par un époux, mais la disparité entre les revenus des deux époux après le divorce. Bien souvent, les montants obtenus se révèlent faibles au regard du travail effectué.

Les conséquences de la durée de la procédure de divorce

Outre l’impact psychologique provoqué par le divorce sur le dirigeant, une procédure trop longue, qui peut notamment être provoquée par un manque de précaution en amont, impacte également le bon fonctionnement de la société en elle-même.

Par exemple, il sera pendant cette phase difficile voire impossible pour le dirigeant d’obtenir un prêt bancaire. Certains projets devront donc potentiellement être mis en suspens.

Un divorce à l’amiable sera systématiquement préférable à un divorce judiciaire pour de multiples raisons et, en notre qualité de conseil, nous avons un rôle d’accompagnement préalable à jouer afin de faciliter cette potentielle transition pour notre client.

Un article de Frédéric Espirat issu de l’IFEC Mag 74 – Expert-comptable patrimonial, Président de la Commission Conseil Patrimonial de l’IFEC.